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Francesco Durante

Messa di Requiem

Vespro breve

Litaniae Lauretanae

 

Pour ce voyage à la découverte de l'univers musical sacré de Naples dans la première moitié du XVIII° siècle, la Capella concertata sera constituée d'une phalange de 15 musiciens professionnels, tous rompus aux pratiques d'exécution de la musique ancienne et à son interprétation "historiquement informée".

Ainsi donc, l’édition 2023 des Concerts de la Toussaint sera entièrement consacrée à des œuvres rares du compositeur napolitain Francesco Durante, (1684-1755), "le plus grand harmoniste d'Italie, c’est-à-dire du monde", si l'on se réfère à l'opinion de Jean-Jacques Rousseau.

Considéré comme l'un des principaux "maestros" de l'école napolitaine de la première moitié du XVIII° siècle, il a enseigné à partir de 1728 dans les conservatoires les plus importants de Naples (S. Onofrio, Poveri di Gesu Cristo, S. Maria di Loreto) avec pour élèves, outre Pergolèse, les compositeurs d'opéras les plus marquants de cette époque comme Jomelli ou Paisiello. Pourtant, il n'a pas composé dans le genre de l'opéra et a principalement œuvré comme maitre de chapelle et compositeur de musique sacrée. Sa profonde connaissance du style contrapuntique de Palestrina remonte probablement à sa fréquentation du milieu romain où son nom apparaît dans le registre de 1718 des maîtres et professeurs de la Congregatione e Accademia di S. Cecilia de Rome, où il a aussi assumé la charge de maître de la chapelle de S. Giacomo degli Spagnoli.

À partir de 1745 jusqu'à sa mort, Durante a été en poste comme « primo maestro » à Sant'Onofrio, où il avait lui-même été élève, tout comme d'autres grands noms de la musique napolitaine du XVIIIe siècle, parmi lesquels Nicola Fago, Leonardo Leo, Nicola Porpora, mais aussi Francesco Feo et Girolamo Abos.

La Messa di Requiem à 4 con Violini e Basso continuo, dont l'autographe est conservé à la Biblioteca Statale Oratoriana dei Girolamini, à Naples, est daté du 27 novembre 1738.  
Il s'agit du Requiem en sol mineur, vraisemblablement le plus ancien des trois requiem définitivement attribués à Durante sur les six qu'il aurait composés.

Écrite pour quatre voix (CATB), deux violons et basse continue, cette messe des morts est amplement inspirée du langage de la polyphonie de la Renaissance et adopte des procédés d'écriture en référence au stile antico alla Palestrina : un contrepoint complexe construit de canons, de fugues, un usage de la technique du cantus firmus, l'utilisation du plain-chant, ainsi que de divers éléments rhétoriques (comme les hexacordes chromatiques descendants). L'alternance de sections homophoniques en accords et de sections contrapuntiques en imitation, l'emploi fréquent, y compris chromatique, de dissonances et de modulations inhabituelles ou la réduction de la valeur des notes lors des répétitions de phrases font partie des principaux procédés de composition déployés par Durante dans ce Requiem.

 

L'histoire et le contexte du Vespro breve sont mal connus, car aucun manuscrit autographe de l'œuvre n'a survécu ; la source principale est une copie manuscrite de son élève Giuseppe Sigismondo.

À l'instar de ce que l'on rencontre déjà avec la "Selva morale" de Monteverdi, comme d'ailleurs aussi chez de très nombreux autres compositeurs de l'époque baroque, les différents psaumes de vêpres apparaissent en plusieurs versions chez Durante, offrant ainsi un choix de psaumes qu'on sélectionnait librement pour les associer avec d'autres motets et antiennes en fonction des besoins ou en vue de liturgies spécifiques.

Hormis le Beatus vir à 3, ces psaumes sont composés à 4 voix avec 2 violons et basse continue.
Le langage de Durante exploite plusieurs procédés du stile concertato, principalement dans les dialogues des voix chantées qui finissent par se réunir polyphoniquement dans les brefs épisodes cadentiels.  Les contrastes dynamiques se réalisent naturellement en fonction des masses sonores mises en œuvre, les "tutti" étant essentiellement réservés au texte de la doxologie ("Gloria Patri et Filio…, Sicut erat in principio…) conclusive de chaque psaume ou sur certaines paroles particulièrement expressives. Assez fréquemment, le style d'écriture en imitation se manifeste à travers l'opposition des voix en couples, mettant en évidence le raffinement de l'écriture et un goût contrapuntique discret.


Quant aux parties de violons, elles évoluent la plupart du temps en parallèle et en doublure des voix chantées, s'enrichissant de quelques motifs figuratifs ou de contrepoints imitatifs dans les passages concertants avec les voix solistes.

Tout au long de ce corpus des cinq psaumes de l'ordinaire des Vêpres du dimanche, Durante exploite avant tout les ressources du style concertant, avec un grand soin de concision dans la mise en musique des textes sans aucune redondance et avec une expressivité discrète et mesurée.

 

Litaniae Lauretanae

L’œuvre est aussi écrite pour 4 voix (CATB), 2 violons et basse continue ; elle s’articule en trois parties autour du texte des « Litanie della Beata Maria Vergine » ou Litanies de Lorette (qui tirent leur nom du sanctuaire italien de Loreto où le texte a été adopté en 1558), cette invocation de la Vierge Marie et l'éloge, dans l’imagerie chrétienne, de son rôle unique en tant que mère du Sauveur.

Débutant par la triple invocation du « Kyrie eleison », symbolique de la Trinité, la litanie se poursuit, sous la forme d’une énumération des qualificatifs religieux de la Vierge Marie, à travers une longue série d'invocations de nature répétitive adressées à la « Mater »,
« Virgo », « Vas » ou « Regina » et ponctuées par les formules de prière « Ora pro nobis » ou
« Miserere nobis ».

La deuxième partie se caractérise par son rythme ternaire qui tourne sans relâche comme une danse obstinée jusqu’à un large « Ora pro nobis » conclusif de style polyphonique.

L'ensemble se termine par un tercet d'Agnus Dei en écriture homophonique, s’achevant par une ultime supplique sur un émouvant tétracorde descendant chromatiquement.

Pour l'exécution de ces pages de musique sacrée, le choix d'effectifs restreints permet de mettre en exergue les qualités madrigalesques du style de Durante, tout en portant l'accent sur les caractéristiques concertantes de son écriture et la délicatesse expressive de son langage.

Fidèle à son esprit de découverte, la Capella concertata espère une fois de plus susciter la curiosité du public en levant un coin du voile sur la musique sacrée napolitaine du XVIIIe siècle et en rendant hommage à l'un de ses chefs de file. Les Concerts de la Toussaint du samedi 28 octobre 2023 à 17h30 à Fribourg et du dimanche 29 octobre 2023 à 17 h à Bulle en seront une nouvelle occasion à ne pas manquer.

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